Galets sans-fil

2022

Galets peints aux noms de réseaux Wi-Fi trouvés au Mas d’Azil.

Sur les deux-mille galets peints recensés par les archéologues, plus des deux tiers proviennent du Mas d’Azil. Les théories les plus convaincantes au sujet de leur signification semblent suggérer que les signes qu’ils arborent soient les premières manifestations connues d’un système de proto-langage écrit.

Le ciel de notre monde est incessamment traversé par du langage numérique, contenu entre autre dans les ondes WiFi. De multiples dispositifs numériques essentiellement composés de minéraux permettent aujourd’hui de se connecter à cette matrice invisible, en générant eux-même un signal réseau.

À l’échelle physique, ce sont des boitiers branchés ou non, des téléphones ou d’autres objets dits connectés. Pour des raisons pratiques cependant, chacun d’entre eux se doit d’être identifiable par un matricule spécifique. Cumulés, ces identifiants forment un nuage de noms répartis dans l’espace et qu’il est possible de percevoir par le biais de l’un de ces dispositifs.

Ces machines et leurs noms flottants constituent pour la plupart d’entre nous un environnement quasi naturel, car préexistant. Personne ne sait comment tout cela fonctionne, et limite ses propres compétences en la matière au strict minimum nécessaire pour permettre l’échange de données.

De rares utilisateurs néanmoins, se saisissent du nom de leur galet électronique, et font le choix de le modifier, d’y apposer leur marque personnelle, dans le but de le rendre reconnaissable, singulier. Ils choisissent le nom de leur réseau WiFi.

Peut-être en profitent-ils aussi d’ailleurs pour choisir un mot de passe mieux adapté à leur mémoire, mais cela demeure un secret. Le changement d’identifiant, quant à lui, est visible aux yeux de tous dans un certain périmètre.

Le galet non-peint, perdu au fond de l’Arize, correspond alors au Livebox-17D0 et autres SFR_A148. Leurs formes bien qu’uniques, les rend similaire au regard humain.

Le nom de réseau personnalisé rayonne alors au milieu de la liste qui le contient, tel un fragment littéraire microscopique témoignant d’un acte de volonté. Il peut même, dans certains cas encore plus rares, s’adresser directement à ses lecteurs collatéraux et les interpeller.

Les galets ici présentés ont été récoltés sur les rives de l’Arize, et choisis pour l’adéquation de leur forme au projet d’écriture auquel ils étaient destinés. Ce sont ensuite les noms de points d’accès réseau présents dans le village qui ont fait l’objet d’une seconde collecte, bien plus impalpable cette fois-ci et ne nécessitant pas le moindre sac à dos car afin de récolter ces données, il aura suffi d’arpenter les trottoirs du village muni d’un téléphone portable.

Les noms de réseaux suspectés d’avoir été personnalisés ont alors été soigneusement conservés puis inscrits en rouge sur ces galets.

Cette pièce et la lecture qui vient d’en être proposée inspirera peut-être les habitants du Mas d’Azil, une fois rentré chez eux, à saisir leur clavier afin de peindre, eux aussi, leur galet.

Qu’ils soient par ailleurs entièrement rassurés, car aucun galet non sécurisé n’aura été découvert lors de ces captations.

Voir aussi :
Première connexion
Villes sans-fil
Eurowifi
Demi-tour WiFi